La  loi N° 16/008 du 15 juillet 2016 modifiant et complétant  la loi n°87-010 du 1er août 1987 portant code de la famille  dans son article 352 stipule ceci : « L’homme et la femme avant dix-huit ans révolus ne peuvent contracter mariage. »   Et pourtant  11 % des femmes mariés se sont mariées  avant l’âge de 15 ans  selon les statistiques  de 2016 révélées par l’UNFPA. Ceci pour dire que les mariages précoces sont une réalité en RDC.

Dans le haut Katanga,  le mariage précoce est  une question complexe. Ce fléau touche  les villages, les milieux péri-urbains et parfois même  les grandes villes comme Lubumbashi et Likasi.

Pour  Maitre Pascal Banza  chargé du programme M E ainsi que le point focal genre de l’UNFPA, « même si on se butte à un problème des données sur cette question, les mariages précoces n’en demeurent pas moins une réalité. » Citant les coins les plus touchés , il parle des territoires de Kasenga , de Kambove , de Pweto  et Kawama ou leS mariages  précoces sont en surnombre. A Kawama, un village situé à 7 km de la ville de Lubumbashi, 8 femmes sur 10 interrogées ont reconnu avoir contracté un mariage avant l’âge de 18 ans soit entre 15 et 16 ans. A Kasenga, une localité située à plus de 300 km de Lubumbashi, la situation est la même.

Ecoutez l’interview de Me Pascal Banza :

 

Les us et coutumes ainsi que la pauvreté,  causes principales des mariages précoces  dans le Hhaut- Katanga

«  La cause première est les us et coutumes » dit maitre Pascal Banza.  Et d’ajouter : « Dans les milieux ruraux dès qu’une fille a 13 ans, elle est déjà pointée par une famille pour être prise en mariage. Les parents préfèrent qu’elle soit mariée plutôt que d’attendre l’âge légal par crainte qu’elle ne tombe enceinte ».

Une autre cause, c’est la pauvreté. Monsieur Kyango Kibamba Jean, chef  du village adjoint de Kawama, pense que s’il y a trop de mariages précoces, c’est avant tout à cause de la pauvreté. Les filles ne supportent pas de vivre dans la misère avec leur famille et préfèrent se marier même mineures. Maitre Pascal estime aussi que le fait que les parents sont incapables de scolariser leurs filles contribuent largement aux mariages précoces

Des grossesses précoces aux mariages précoces il n y’a qu’un pas

Les mariages précoces sont très «  fréquents  et  cachés ». Pour la plupart des cas, ils sont le fruit de grossesses précoces.  Assy Mujinga ,  une habitante de Kawama,  explique : «  La majorité des filles du village tombent grosses et les parents sont parfois obligés de les donner en mariage.  Elles sont grosses parfois à l’âge de 12 ou 13 ans » renchérit Julie Kilufya une autre habitante de Kawama.  Dans ce village, il  y a un lien direct entre les grossesses des mineures et les mariages d’enfants. Bien que n’étant pas la cause directe des mariages précoces, elles n’en demeurent pas moins une cause indirecte. C’est d’ailleurs ce que pense maitre Pascal Banza :  « La plupart des grossesses se soldent par un mariage. Les parents ont souvent honte de garder une fille enceinte  sous leur toit  et dans beaucoup de cas ils arrangent un mariage avec à la clé la falsification des  documents. »  Qu’ils s’agissent des us et coutumes ou de la pauvreté, les parents donnent leur fille en mariage soit pour éviter les grossesses précoces ou encore pour éviter à leur fille tombée enceinte de ne pas se couvrir de honte.

Ecoutez ces témoignages ci-dessous :

Les lois en matière de mariages précoces doivent être appliquées

Il est vrai que sur la question des mariages précoces, la RDC possède un arsenal juridique adéquat, en commençant par le code pénal, le code de la famille ou encore la loi portant protection des enfants. Néanmoins, son application reste chaotique. « Nous demandons l’implication de l’Etat pour mettre fin à cette situation », dit Kyango Kibamba Jean  chef du village adjoint de Kawama.   Mais comment faire appliquer ces dispositions juridiques sur une population ignorante des lois, mais surtout pauvre !  Il est donc nécessaire de pouvoir sensibiliser  cette population au bienfondé  de la lutte contre  les mariages précoces.