Si vous m’aviez demandé quel était selon moi le mot de l’année 2017, je vous aurais répondu sans hésiter : « féminisme ». Pas seulement pour ce qu’il représente pour moi, mais surtout pour le chemin qu’il a parcouru.

Le féminisme, lorsque j’ai commencé à écrire sur Internet, en 2012, c’était un gros mot. Chez madmoiZelle, on publiait des « mauvaises raisons de ne pas être féministe », mi-sérieuses mi-ironiques. Il était de bon ton de plaisanter, quand on parlait de féminisme. Trop de sérieux sur le sujet, voilà qui pouvait rebuter.

Le féminisme, de tabou à gros mot ?

En juillet 2014, j’écrivais sur « les femmes contre le féminisme », une mouvance aussi surprenante que préoccupante : des femmes se revendiquaient « contre le féminisme », en affichant pourtant des arguments… faisant d’elles des féministes convaincues. Étrange qui pro quo. En septembre de la même année, Emma Watson lançait un appel aux féministes introvertis. Du même coup, elle contribuait à désacraliser ce mot, le débarrasser de cet injuste sceau d’un extrémisme fantasmé. À la tribune de l’ONU, par les mots d’Emma Watson, le féminisme devient « mainstream » dans le discours. Mais il renvoie toujours à des réalités bien diverses, selon l’imaginaire de la personne à laquelle on s’adresse…

Je dis « féminisme » dès que je veux faire référence à cette idée révolutionnaire, radicale, innovante, selon laquelle les hommes et les femmes devraient pouvoir jouir des mêmes droits et libertés au sein d’une société. Et que dans l’absolu, on devrait pas avoir à prendre en compte le genre des gens. Mais j’avais bien conscience que cette définition n’était pas la plus répandue, dans l’esprit de beaucoup, beaucoup de gens.

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Quand le féminisme fait son chemin dans les consciences

« féminisme » était encore un gros mot, un étendard de rébellion contre l’ordre établi, tout juste si ce n’était pas carrément la menace d’un chaos. En 2017, le féminisme s’est invité, que dis-je, imposé dans la campagne pour l’élection présidentielle (NDLRDC : en France). Il s’est inscrit à l’ordre du jour, dans les programmes, dans les discours, dans les mensonges aussi. Et puis, il y a eu #MeToo. Une déferlante si forte, si impressionnante, que toutes celles et ceux qui ont brisé le silence ont été nommés personnes de l’année par le TIME.

Le mot « féminisme » cristallise peut-être toujours des résistances, des tensions, des débats, mais l’idéal qu’il porte n’est plus autant moqué : il suscite de plus en plus d’intérêt, de curiosité. L’illustration de cette évolution, c’est le nombre et les fréquences des recherches sur le féminisme, en 2017.

Féminisme, mot le plus recherché en 2017

Selon le Merriam-Webster Dictionary, le mot le plus recherché en 2017 était « féminisme ». Il l’était déjà en 2016, mais ces recherches ont augmenté de 70% sur l’année 2017. Certains piques d’intérêt apparaissent en coïncidence avec des articles de presse ou des interviews médiatisées. Lorsqu’une personnalité déclare par exemple qu’elle n’est « pas féministe », cette déclaration suscite des recherches sur le mot.

Alors, nous sommes en décembre 2017. Il y a toujours des anti-féministes, il y a toujours énormément de « je ne suis pas féministe, mais » qui trahissent souvent une incompréhension de ce qu’est le féminisme. Il y a toujours, c’est certain, un grand besoin de féminisme dans nos sociétés. Et il y a, heureusement, de plus en plus de féminisme dans l’actualité, dans nos discussions, dans nos vies. J’aurais choisi « féminisme » comme mot de l’année 2017, oui. Mais selon le Merriam-Webster Dictionary, c’est nous tous et toutes ensemble qui l’avons choisi. On dirait bien, en cette fin 2017, que le monde est en train de changer. Il était temps.

Par Clemence Bodoc | 13 décembre 2017 |mademoiZelle

Regardez la vidéo « Le féminisme rien n’est acquis ! »

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