La maternité est un magnifique cadeau, mais ne te définis pas uniquement par le fait d’être mère. Sois une personne pleine et entière. Ce sera bon pour ton enfant.
L’Américaine Marlene Sanders, pionnière du journalisme et première femme à couvrir la guerre au Vietnam (et qui avait elle-même un petit garçon), a un jour donné ce conseil à une consœur plus jeune: «Ne vous excusez jamais de travailler. Vous aimez ce que vous faites, et aimer ce que vous faites est un merveilleux cadeau à offrir à votre enfant.»
Je trouve ce conseil extrêmement sage et émouvant. Tu n’es même pas obligée d’aimer ton travail; tu peux te contenter d’apprécier ce que t’apporte ton travail : la confiance, le sentiment d’accomplissement que tu acquiers en étant active, en gagnant ta vie.
Je ne suis pas surprise que ta belle-sœur affirme que tu devrais être une mère «traditionnelle» et rester à la maison, que Chudi a les moyens d’entretenir une famille sans «double revenu». Les gens utilisent la «tradition» comme cela les arrange, pour justifier tout et n’importe quoi. Réponds-lui que la véritable tradition igbo, ce sont les familles à double revenu parce que, avant la colonisation britannique, non seulement les femmes cultivaient la terre et faisaient du commerce, mais le commerce était même une activité exclusivement féminine dans certaines régions du pays igbo. Elle le saurait, si elle lisait des livres de temps en temps. Bon d’accord, cette pique, c’était pour te faire sourire. Je sais que cela t’agace (et tu as raison), mais il vaut vraiment mieux que tu l’ignores. Tout le monde aura une opinion sur ce que tu dois faire, mais ce qui compte c’est ce que toi tu veux pour toi, et non ce que les autres voudraient que tu veuilles. Refuse, je t’en prie, l’idée selon laquelle la maternité et le travail seraient incompatibles.
Nous avons grandi avec des mères qui travaillaient à plein temps, et nous nous en sommes très bien sorties — toi en tout cas, car en ce qui me concerne le jury n’a pas encore rendu son verdict.
Pendant ces toutes premières semaines de maternité, ne sois pas trop dure avec toi-même. Demande de l’aide. Compte sur cette aide. Superwoman n’existe pas. La parentalité est une question de pratique — et d’amour. (Même si je regrette qu’on ait ainsi forgé un concept à partir du mot «parent», ce qui à mon sens est la cause de ce phénomène si répandu dans la classe moyenne de la «parentalité» vue comme un chemin de croix interminable, et pavé de culpabilité et d’angoisse.)
Accorde-toi le droit d’échouer. Une jeune mère ne sait pas forcément comment calmer un bébé qui pleure. Ne pars pas du principe que tu devrais tout savoir. Lis des livres, cherche sur Internet, demande à des parents plus expérimentés, ou essaie tout simplement en tâtonnant. Mais surtout, ne perds jamais de vue le fait de rester une personne pleine et entière. Accorde-toi du temps pour toi. Satisfais tes propres besoins.
Ne crois pas pour autant qu’il s’agit là de «tout gérer de front». Notre culture glorifie les femmes capables de « tout gérer», mais ne remet jamais en cause le postulat sous-jacent à de telles louanges. Débattre de la capacité des femmes à « tout gérer» ne m’intéresse absolument pas, car c’est un débat qui suppose que l’éducation des enfants et les tâches domestiques sont des domaines exclusive- ment féminins, idée à laquelle je suis résolument opposée. Les tâches domestiques et l’éducation des enfants devraient appartenir également aux deux sexes, et nous devrions nous demander non pas si une femme est capable de «tout gérer de front», mais comment aider au mieux les parents à assumer leur double responsabilité, au travail et à la maison.
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