« Je souhaitais que la mort m’emporte car mon mari m’opprimait », se souvient Berancille Mukabandora qui est aujourd’hui vice-présidente d’une association de lutte contre la violence à l’égard des femmes du district de Gakenke, dans le nord du Rwanda. Elle est assise avec assurance autour d’une table aux côtés de plusieurs hommes appartenant à une coopérative. Berancille et ses collègues masculins ont été formés au RWAMREC, le centre de ressources pour les hommes du Rwanda, un partenaire clé d’ONU femmes dans le domaine de la lutte contre la violence à l’égard des femmes.
La formation a permis à Berancille et à son mari d’en savoir plus sur les droits et le partage du travail domestique. « J’ai commencé à prendre confiance en moi après les formations du RWAMREC », affirme-t-elle. « Désormais, je peux prendre la décision de construire une maison et la bâtir …. Même les enfants ont changé. J’ai cinq filles et elles savent toutes que si les toilettes sont détruites, nous ne pouvons pas attendre que les familles qui ont des garçons viennent les réparer. Elles peuvent m’aider à confectionner des briques pour que nous construisions des toilettes. »
Malgré les progrès réalisés dans d’autres aspects de l’égalité des sexes, la violence à l’égard des femmes au Rwanda demeure courante. En effet, 48 pour cent des femmes âgées de 15 à 49 ans ont subi des violences physiques ou sexuelles au cours de leur vie, selon l’enquête démographique et de santé du Rwanda de 2010.
Edouard Munyamaliza, le secrétaire exécutif du RWAMREC, affirme que bon nombre d’hommes adoptent la masculinité négative et la violence parce qu’ils craignent que la société ne leur jette l’opprobre : « Si je ne me comporte pas de cette façon, la communauté me disqualifiera en tant qu’homme. » Il affirme qu’une approche positive et non violente de la masculinité est le point de départ de la lutte contre la violence à l’égard des femmes. Ensuite, les hommes peuvent s’opposer aux normes ou aux pratiques traditionnelles préjudiciables.
« En raison des enseignements que nous avons reçus, nous pensions que les biens appartenaient à l’homme et que la femme n’avait pas son mot à dire », explique un travailleur masculin de la coopérative qui a été formé par le RWAMREC. « Ma famille est paisible aujourd’hui et nous avons découvert que nos épouses sont nos alliées. Nous ne faisons qu’un avec nos épouses et puisqu’elles font partie de nous, nous ne pouvons pas leur faire de mal. »
Avec l’aide d’ONU Femmes, le RWAMREC a formé 3 000 responsables locaux dans le domaine de la violence à l’égard des femmes. Ces femmes et ces hommes ont été élus en tant que représentants de l’administration locale à tous les niveaux et elles et ils exercent une grande influence au sein de leurs communautés.
Les séances de formation durent entre deux et quatre jours et la participation se fait sur la base du volontariat. Dans un premier temps, des formations distinctes sont dispensées aux hommes et aux femmes afin que chacun soit à l’aise pour s’exprimer. Elles et Ils sont ensuite réunis pour suivre une série d’activités et de débats participatifs portant sur les droits des femmes, le rôle des hommes dans la promotion des droits des femmes, la législation relative à la violence à l’égard des femmes et les normes et pratiques traditionnelles qui accordent trop de pouvoir aux hommes.
Les questions relatives à la masculinité sont également abordées, de même que la problématique des « féminités ». Les membres du personnel du RWAMREC remarquent que bon nombre de femmes rwandaises estiment être obligées d’accepter la violence pour préserver leur foyer et leur famille. Au début des formations, de nombreuses femmes considéraient leurs maris non pas comme des partenaires, mais comme des « chefs ».
À l’issue des formations, les femmes déclarent que la violence à leur égard a fortement reculé dans leur foyer. Elles trouvent également un nouveau soutien de la part de leurs époux quand il s’agit de prendre des décisions et d’exercer des activités économiques et sociales.
Les formations du RWAMREC intègrent souvent des jeux de rôle, dans lesquels les hommes portent par exemple un jouet sur le dos pour cuisiner, faire le ménage et effectuer des travaux agricoles. Shamsi Kazimbaya, coordinatrice du projet et animatrice de la formation, remarque que le jeu de rôle aide les hommes à mieux comprendre à quel point il peut être accablant d’avoir à remplir plusieurs rôles. Après ces formations, les participantes et participants élaborent un plan d’action qu’ils s’engagent à mettre en œuvre afin de sensibiliser des groupes locaux à la question de la violence à l’égard des femmes.
Les animateurs du RWAMREC soulignent qu’ils ne sont pas responsables de l’application de la loi et font souvent part de leurs expériences personnelles aux groupes de formation, ce qui contribue à favoriser un sentiment d’appartenance. Ils trouvent que la meilleure façon d’impliquer les hommes est de leur faire comprendre qu’ils sont tous concernés par les normes traditionnelles, y compris l’animateur.
« Au départ, de nombreux hommes invoquent les normes culturelles relatives à la discipline des conjointes pour justifier leurs violences », explique Silas Ngayaboshya, un animateur du RWAMREC. Dans ses formations, il demande souvent aux hommes de lui indiquer en quoi la discrimination à l’égard des femmes relève de leur culture.
Le RWAMREC joue un rôle de premier plan concernant l’implication des hommes envers les questions relatives à l’égalité des sexes au Rwanda, avec l’appui de l’État rwandais et d’ONU Femmes, entre autres partenaires. ONU Femmes apporte un soutien financier et technique afin de renforcer les capacités des responsables communautaires locaux.
Pour obtenir de plus amples informations sur les efforts que déploie ONU Femmes pour mettre fin à la violence à l’égard des femmes, veuillez consulter la compilation Gros plan que nous avons spécialement créée à l’occasion du 25 novembre qui est la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes.
Commentaires récents