Les députés viennent de commencer le débat sur le projet de révision de la loi électorale. Pour faire progresser la parité et l’accès des femmes aux postes de décision politique ? Que non ! Leurs préoccupations sont tout autres .Se maintenir au pouvoir et se partager le gâteau.
Dégustez ce savoureux morceau de débat entre patriotes « ventriotes » EN CLIQUANT CI-DESSOUS
Cela ne vous donne pas plutôt envie de vomir ?
Ne vous attendez donc pas à trouver dans ce projet la moindre préoccupation au sujet de la mise en oeuvre de l’article 14 de notre Constitution. L’exposé des motifs ne mentionne même pas la prise en compte de la parité comme un des motifs invoqués pour modifier la loi électorale.
Les articles modifiés n’améliorent en rien l’accessibilité de la femme congolaises aux postes de décision. Que du contraire !
L’article 13 al. 3 et 4 de la loi électorale révisée en 2015 dit ceci :
« Chaque liste est établie en tenant compte de la représentation paritaire homme-femme et de la promotionde la personne avec handicap.
La non réalisation de la parité homme-femme ou la non présence d’une personne avec handicap ne constitue pas un motif d’irrecevabilité de la liste concernée« .
Et ces messieurs veulent le remplacer par : « Conformément à l’article 14 de la Constitution, chaque liste est établie en tenant compte de la représentation paritaire Homme / Femme« . L’alinéa 4 passe à la trappe et n’est surtout pas remplacé par : « La non réalisation de la parité homme-femme constitue un motif d’irrecevabilité de la liste concernée » comme le réclame non seulement l’Observatoire de la parité depuis 10 ans mais aussi le Mouvement « Rien sans les femmes » qui a déposé en 2015 une pétition en ce sens au Parlement.
Le projet de révision n’apporte aucun changement sur ce point et n’instaure pas l’obligation pour les partis d’aligner des femmes sur leur liste de candidats, sous peine de sanction.
Ce n’est pas tout ! Des conditions d’inéligibilité, ajoutées lors de la révision de 2015, qui sont contraires à l’article 5 de la Constitution et qui constituent aussi des obstacles pour les femmes à se porter candidates aux élections sont maintenues et même aggravées.
La condition de possession d’un diplôme ( d’enseignement supérieur ou universitaire le plus souvent) est maintenue pour pouvoir se porter candidat.e, ce qui est contraire à l’art. 5 de la Constitution qui n’a jamais prévu cette condition d’inéligibilité. Elle pénalise aussi les femmes qui ont moins d’accès aux études supérieures. A défaut de diplôme, une expérience professionnelle de quelques années peut être invoquée MAIS cette exigence exclut la plupart des jeunes de plus de 18 ans réduits au chômage ou n’ayant une expérience professionnelle que très courte.
Les « frais de dépôt de candidature non remboursable » (aussi appelé cautionnement électoral (art. 21)) qui sont aussi contraires à la Constitution, eux aussi, ne sont pas supprimés mais au contraire sont aggravés et sont quasiment inabordables pour les femmes, à presque tous les niveaux des élections. Jugez-en :
Election présidentielle
100.000.000.Fc = 66.666$
Elections des députés nationaux et provinciaux :
Actuellement 500.000 Fc par liste ou par candidat indépendant.
Dans le projet :
1 siège visé : 800000 Fc = 533$
8 sièges visés ou + : 450000 Fc = 300$
Elections des sénateurs :
Actuellement : 500.000 Fc par liste ou par candidat indépendant
Dans le projet :
1 siège visé : 1200000 Fc = 800$
4 sièges visés ou + : 900000 Fc = 600$
Election du gouverneur et vice-gouverneur :
Actuellement : 2 500 000 francs congolais par liste ;
Dans le projet : 5.000.000 Fc = 3.333$ par chacun des candidats
Elections locales :
Elections urbaines
Elections conseillers urbains :
Actuellement : 100 000 francs congolais par liste ou candidat indépendant
Dans le projet :
1 siège visé : 300.000 =200$
4 sièges visés ou + ! 150.000 = 150$
Maire et maire-adjoint :
Actuellement : 400 000 francs congolais par liste ;
Dans le projet : 2500000 fc =1666$ par chacun des candidats
Elections communales
Conseiller communal , de secteur/chefferie
Actuellement : 100 000 francs congolais par circonscription électorale ;
Dans le projet :
1 siège visé : 300000 Fc = 200$
3 sièges visés ou + : 200000 Fc = 133$
Bourgmestre et bourgmestre adjoint
Actuellement : 200 000 francs congolais par liste;
Dans le projet :
750000 Fc = 500$ par chacun des candidats
Elections Secteur/Chefferie
Chef Secteur et adjoint :
500000 Fc = 333$
Chef de chefferie :
actuellement : 0 Fc = 0$
Dans le projet : 0 Fc = 0$
Les chefs de chefferie, contrairement aux autres chefs d’ETD, comme les bourgmestres et les chefs de secteur, ne seront pas élus au scrutin indirect par les conseillers élus mais seront désignés « selon la coutume » et ils ne devront donc pas payer de frais de dépôt de candidatures puisqu’ils ne devront pas être candidats et exerceront un mandat public (à vie) SANS ELECTION !!!
Cette anomalie démocratique, clairement inconstitutionnelle, écarte quasi totalement les femmes de la direction des ETD Chefferies, les plus nombreuses à l’Est de la RDC.
Espérons qu’en sus des débats nécessaires sur les « seuils électoraux » et sur les « machines à voter », quelques parlementaires auront le courage de se lever pour faire respecter l’article 14 de la Constitution, faire supprimer de la loi électorale toutes ces discriminations négatives pour les faire remplacer par des discriminations positives en faveur des femmes.
VOUS POUVEZ TROUVER UN ARGUMENTAIRE PLUS DETAILLE DANS :
- ARGUMENTAIRE Propositions de modifications de la loi électorale prenant en compte la parité
- La Requête en inconstitutionnalité de la loi électorale introduite à la Cour Constitutionnelle (il y a plus de 2 ans !à, EN CLIQUANT CI-DESSOUS ;
La discrimination des femmes sur la scène politique congolaise est très réelle, du fait que les femmes sont confrontées à deux sortes d’obstacles qui freinent leur participation à la vie politique. D’une part, des entraves structurelles causées par des lois et des institutions discriminatoires qui réduisent leurs possibilités de voter ou de se porter candidates à un mandat politique. D’autre part, les femmes ont généralement moins de chances que les hommes de suivre une formation, de nouer les contacts et de bénéficier des ressources nécessaires pour devenir des dirigeantes performantes (voir carburant de la parité sur http://www.ceap-rdc.blogspot.com).
Pour favoriser l’apparition des femmes sur la scène politique de la RDC, le parlement devrait voter une loi instituant la parité hommes-femmes prévoyant que toutes les listes aux élections présidentielle, législatives, régionales, municipales et rurales doivent comporter le même nombre d’hommes et de femmes, et à défaut être jugées irrecevables. Ce système garantit aux femmes, non seulement une représentation équitable en nombre, mais aussi des places de choix sur le plan électoral, ce qui évite qu’elles ne soient reléguées en bas des listes.