LE PROBLEME
- La fracture numérique entre les genres
On parle de « fracture numérique entre les genres » pour désigner, dans tous les pays, les différences entre les hommes et les femmes en matière de ressources, de capacités d’accès et d’utilisation efficace des technologies de l’information et de la communication (TIC). Aujourd’hui dans le monde, les femmes et les filles ont 25 % de chances en moins que les hommes de savoir exploiter les technologies numériques à des fins élémentaires, quatre fois moins de chances de savoir comment programmer un ordinateur et treize fois moins de déposer un brevet technologique[1] Les inégalités de genre concernent les niveaux de compétence les plus bas, l’utilisation d’applications sur un téléphone portable, ainsi que des compétences plus avancées comme le codage. Les principales causes sont liées aux difficultés d’accès aux outils, aux contraintes financières, aux compétences numériques, à l’intérêt pour les TIC, à la sécurité en ligne et surtout aux stéréotypes, la plupart des facteurs empêchant les femmes de participer pleinement à la société numérique étant basés sur des stéréotypes et des idées préconçues. Une de ces inégalités est celle de l’accès plus limité des femmes à la téléphonie mobile. Au Burundi, par exemple, l’Etude Démographique et de Santé (EDSB-III, 2016-2017) a mis en en évidence des disparités importantes entre les femmes et les hommes. Le pourcentage d’hommes qui possèdent un téléphone portable est deux fois plus élevé que chez les femmes : 48 % des hommes contre 24 % des femmes[2] . L’écart entre les sexes dans le numérique a aussi un impact sur l’élargissement des inégalités économiques et sociales. Leur manque d’inclusion a des répercussions financières énormes[3]. Malheureusement donc, les opportunités de la révolution numérique présentent également le risque d’une perpétuation des modèles existants sur le plan de l’inégalité des sexes. Les inégalités croissantes deviennent de plus en plus évidentes dans le cadre des compétences numériques et de l’accès aux technologies, les femmes étant laissées pour compte en raison de cette fracture numérique entre les sexes.
Comme plusieurs études et sondages le prouvent, un très grand nombre d’africain.e.s, de Burundais.es, de Congolais.es et des publics cibles des organisations de défense des droits de la femme sont déjà ou seront de plus en plus utilisatrices d’un smartphone (en français, téléphone intelligent) qui leur permet non seulement de :
- téléphoner à moindre coût et d’utiliser les réseaux sociaux (WhatsApp, Facebook, Instagram, Tik Tok, etc.), mais aussi
- s’informer (via les médias en ligne de + en + nombreux),
- lire (via les e-books),
- se former (via les plateformes de E-learning et les MOOC),
- se documenter (via les bibliothèques numériques) mais encore
- plaidoyer, revendiquer, se mobiliser, etc.
bref de participer à la « transition/révolution numérique » et d’exercer de plus en plus et de mieux en mieux, à travers les « technologies citoyennes, » les « civic tech », leur « citoyenneté numérique ».
Plusieurs obstacles doivent néanmoins encore être surmontés pour s’engager résolument dans cette voie et résorber cette « fracture numérique ». Au niveau individuel, beaucoup de femmes et de jeunes-filles manquent :
- de moyens financiers pour accéder à l’Internet (coût des mégas, absence de point d’accès wifi gratuit, etc.)
- d’encadrement, de formation et de connaissances techniques pour exploiter au mieux toutes les technologies numériques,
- de capacités pour une utilisation intelligente (smart) et optimale de toutes les potentialités offertes par les smartphones,
- d’esprit critique pour faire face aux fake news, à la désinformation, véhiculées par les réseaux sociaux et les médias en ligne,
Le premier objectif du Projet Espace(s) de coworking « La force des femmes » est de développer des initiatives concrètes dans la réduction de cette fracture numérique entre les genres[4].
La proposition est donc d’ouvrir, à titre de projet-pilote, un ou plusieurs ESP@CE(S) DE COWORKING « LA FORCE DES FEMMES », qui devrai(en)t fournir accès à un ensemble de services utiles, à un niveau individuel, à de nombreuses femmes et jeunes-filles (ainsi qu’à des hommes « genrés ») désireuses d’utiliser une large palette d’outils numériques ;
- Le déficit des OSC en matière de transition numérique
La généralisation et à la pénétration inexorables des technologies et outils numériques, de plus en plus répandus et utilisés (Internet, Réseaux sociaux, WhatsApp, Smartphones, etc.) par la plupart des groupes cibles des OSC (femmes, jeunes filles et jeunes gens, dirigeant.e.s d’OSC, femmes leaders, femmes politiques, entrepreneures, autorités nationales, provinciales et locales, etc.) permettent dorénavant de réaliser, de façon plus efficace et moins coûteuse, la plupart des activités de formation, de sensibilisation, de plaidoyer, de réseautage, de mobilisation sociale, etc. en faisant un recours intensif aux nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC).
L’efficacité et la durabilité de l’action d’une organisation de la société civile peuvent être aujourd’hui assurées d’avantage par l’utilisation des NTIC que par les activités et méthodes traditionnelles utilisées pour la sensibilisation, la formation, le renforcement des capacités, le plaidoyer, etc. tels les ateliers, conférences, forums, tables rondes, sessions de formation en présentiel, etc. qui présentent les grands désavantages d’être très coûteux et de n’atteindre le plus souvent qu’un public restreint, limité le plus souvent aux privilégié.e.s qui vivent dans les centres urbains. Des résultats, comparables voire même bien supérieurs, peuvent être obtenus en utilisant tous les outils de la « révolution numérique » c’est-à-dire l’Internet, les réseaux sociaux, et les smartphones de plus en plus répandus et de moins en moins chers.
Plusieurs obstacles doivent néanmoins encore être surmontés pour engager résolument dans cette voie de la « transtion numérique » les organisations de la société civile (OSC), particulièrement celles de défense des droits de la femme et de la jeune-fille. Beaucoup d’entre elles manquent :
- de bureaux, d’espaces de travail, de réunion, etc. vu la difficulté grandissante d’obtenir des financements des partenaires techniques et financiers
- d’accès à l’Internet à moindre coût,
- des moyens techniques (laptops, tablettes, liseuses, projecteur, imprimante, etc.)
- de la formation et de l’encadrement nécessaires
pour pouvoir mettre en œuvre, aujourd’hui et dans les années à venir, en ayant recours plus intensivement aux technologies numériques, leurs activités dans les domaines de sensibilisation, de formation, de renforcement des capacités, de réseautage, de plaidoyer, d’analyses/études, etc.
L’originalité et le caractère novateur du Projet d’Esp@ce de coworking « La force de femme » est d’avoir pour 2ème objectif de renforcer les organisations de la société civile (OSC), plus particulièrement celles de défense des droits des femmes, à l’heure de la « transition/révolution numérique »
- La crise de la « démocratie représentative »
L’indice de perception de la démocratie a révélé qu’une majorité de citoyens dans le monde ont le sentiment “de ne pas avoir voix au chapitre en politique et que leurs gouvernements n’agissent pas dans leur intérêt”[5] Ce désamour ou cette perte de confiance à l’égard de la démocratie représentative a conduit à l’émergence et au développement d’ initiatives de « civic tech » qui témoignent souvent d’un besoin pour les citoyen.ne.s de traduire leur frustration, et parfois leur colère, devant le décalage souvent marqué entre l’affirmation officielle de principes (démocratie et bonne gouvernance) et une réalité de terrain assez éloignée des discours.
L’expression « civic tech » (traduite par « technologies civiques » ou « technologies citoyennes ») est donc très récente et est d’ailleurs souvent inconnue, y compris des acteurs qui œuvrent dans le champ couvert par les civic tech. L’encyclopédie collaborative en ligne Wikipedia définit les civic tech comme « l’ensemble des procédés, outils et technologies qui permettent d’améliorer le fonctionnement démocratique des sociétés et des communautés, en renforçant le rôle joué par les citoyens dans les débats et prises de décision.». Une définition plus complète est celle de la Knight Foundation : les civic tech recouvrent l’utilisation des nouvelles technologies pour renforcer :
>> l’ouverture et la transparence du gouvernement et des autorités locales.
Par exemple : l’ouverture des données et la transparence, la facilitation du processus de vote, la cartographie et la visualisation des données publiques, l’exploitation et l’utilisation des données publiques, la participation à l’élaboration des lois et des décisions gouvernementales, etc.
>> la participation citoyenne.
Par exemple : le développement de réseaux citoyens, l’engagement de communautés locales, le financement participatif, le partage de données citoyennes, la création de plateformes de lobbying citoyens et de mobilisation citoyenne, etc.
Ces « technologies citoyennes » sont aujourd’hui en pleine expansion. Les OSC de la région des Grands Lacs accusent toutefois un grand retard en ce domaine, au regard des expériences et des pratiques développées dans d’autres pays, y compris africains. Pour s’en convaincre, il suffit de parcourir des rapports et études récentes sur ce sujet : Les civic tech en Afrique : citoyens et technologies pour dynamiser la démocratie[6]ou Les tendances du secteur des technologies et des médias en Afrique selon Deloitte ou encore Citoyenneté numérique : ce que l’ Afrique prépare.
Le 3ème objectif du Projet Esp@ce(s) de coworking « La force des femmes » est donc de promouvoir les « technologies citoyennes » (civic tech) pour une gouvernance plus inclusive et une démocratie plus participative
- Les réseaux sociaux et plateformes numériques : vecteurs de désinformation, de discours de haine, de cyber-violence à l’égard des femmes et des filles
Si Internet et les réseaux sociaux ont donné à la société d’énormes possibilités de communication, de participation et d’apprentissage, les réseaux sociaux et les plateformes numériques sont aussi utilisées comme des vecteurs de désinformation, de discours de haine, de théories du complot, de cyber violence à l’égard des femmes qui portent atteinte à la démocratie, aux droits humains et au vivre ensemble.
Les cycles électoraux, à leurs différentes phases et particulièrement celle de la campagne électorale, se caractérise généralement par des affrontements entre groupes rivaux de partisans, des violences, attaques et intimidations perpétrées durant les grands rassemblements électoraux et à l’encontre des candidats, la prolifération des discours de haine, etc. Une étude commanditée par le PNUD, Cartographie des risques de conflits en république démocratique du Congo, avant, pendant et après les élections de 2023, confirme que la campagne électorale et le jour du vote demeurent des périodes fortement périlleuses, mais l’intrusion des réseaux sociaux et leur interaction directe avec le processus électoral tendent à multiplier les situations et les occurrences de violences. La diffusion de « fake news » ou de rumeurs peut enflammer l’opinion à tout instant et invite clairement à une vigilance plus constante centrée sur les nouveaux médias si l’on veut garantir un processus électoral apaisé. Certains médias en ligne et réseaux sociaux peuvent en effet être un élément clef de la fabrique de la violence ; en véhiculant des rumeurs et autres messages de haine, ils participent alors à exacerber les passions et les tensions (RDC 2011, Kenya 2013 et 2017, Zambie 2016, Burkina Faso 2020, etc.)[7]. La revue des processus électoraux passés permet d’identifier plusieurs facteurs et acteurs récurrents générateurs de violences électorales et dont il faudra tenir compte dans une analyse des risques en vue des élections de 2023-24 en RDC et de 2025 au Burundi. . L’analyse des violences électorales en RDC de 2011 et de 2018 notamment, montre que, dans un nombre important de cas, l’instantanéité des informations ou des rumeurs transmises par SMS ou via les réseaux sociaux produisent un mélange particulièrement favorable au déclenchement de la violence et à sa propagation, L’organisation d’une vigilance citoyenne respectueuse des libertés et de l’ordre public en période électorale et la question du rôle des télécommunications et des réseaux sociaux en période électorale devrait donc faire l’objet d’une grande attention.
Les progrès technologiques fournissent également un terrain fertile pour de nouvelles formes de violence à l’égard des femmes et des filles fondée sur le genre, qui se développent aujourd’hui dans des proportions alarmantes et restent largement impunies. Les outils numériques favorisent la perpétration insidieuse d’actes préjudiciables, souvent par des partenaires et d’ex-partenaires, mais aussi par des inconnus. Certes, les hommes peuvent aussi faire l’objet de violences et d’abus en ligne, mais les femmes courent un risque bien plus élevé d’être victimes de formes graves et répétées d’actes préjudiciables commis sur internet ou à l’aide de la technologie : partage non consenti d’images ou de vidéos, intimidations et menaces par courriel ou sur les médias sociaux (y compris menaces de viol ou de mort), harcèlement sexuel en ligne, etc. Les jeunes filles sont particulièrement vulnérables à l’exploitation et aux abus sexuels et au harcèlement dans l’espace numérique[8]
Comme le souligne Dunja Mijatović, la Commissaire européenne aux droits de l’homme la violence en ligne peut aussi être utilisée pour discréditer le pouvoir collectif des femmes : « j’ai observé les attaques dont font l’objet, dans l’espace numérique, des femmes qui manifestent leur solidarité avec des femmes victimes de violences ou d’abus sexuels et qui utilisent leur pouvoir collectif pour se faire entendre sur internet (…) De telles attaques peuvent amener des femmes et des filles à s’autocensurer et à limiter leurs interactions en ligne, voire à déserter complètement les médias sociaux, les réduisant à nouveau au silence».
La violence en ligne peut également être utilisée pour miner un environnement favorable au travail des femmes dans la société : En raison du rôle qu’elles jouent dans la société, certaines femmes et filles peuvent aussi être davantage exposées à ces violences. Des personnalités publiques, des femmes politiques, des femmes journalistes, des militantes écologistes ou autres et des défenseures des droits des femmes investissent de plus en plus l’espace numérique, où elles peuvent réunir des preuves de violations des droits humains et les dénoncer, consulter et partager des informations, gagner en visibilité et organiser des mobilisations. Ce travail est très utile car il ouvre de nouvelles possibilités de sensibiliser la population et d’amener les responsables à rendre des comptes. Toutefois, en montant en première ligne, ces femmes s’exposent à un risque accru de violences et de campagnes de dénigrement visant à délégitimer leur personne et leur action.
Les femmes journalistes peuvent être soumises à une violence et à la misogynie généralisées en ligne[9]. Les défenseures des droits des femmes sont, elles aussi, fortement exposées au risque de violence fondée sur le genre, de harcèlement, d’insultes et d’atteintes à leur réputation sur internet. Les femmes politiques sont une autre cible des violences et des abus en ligne. Les auteurs de ces attaques tentent de faire taire les femmes et de les dissuader de s’engager en politique et de se présenter aux élections[10]
Les technologies de communication étant de plus en plus répandues en Afrique centrale, la diffusion d’informations inexactes, incomplètes ou fabriquées est donc une menace de plus en plus importante pour la paix et la stabilité. C’est pourquoi réguler ces contenus est devenu fondamental. Des efforts de tous les acteurs de l’internet et des réseaux sociaux doivent être déployés pour la régulation des réseaux sociaux et plateformes numériques, non seulement à l’échelle internationale[11] mais aussi au niveau le plus local.
LES OBJECTIFS
De cette analyse des problèmes découlent quatre objectifs spécifique du Projet Esp@ce(s) de coworking « La force des femmes » :
- Réduire les risques de la « fracture numérique » entre femmes et hommes, filles et garçons
- Renforcer les organisations de la société civile (OSC), plus particulièrement celles de défense des droits des femmes, à l’heure de la « transition/révolution numérique »
- Promouvoir les « technologies citoyennes » (civic tech) pour une gouvernance plus inclusive et une démocratie plus participative
- Contribuer à la régulation des réseaux sociaux et des plateformes numériques en luttant contre les contenus illégaux et les opérations de manipulation de l’information
LES ACTIVITES CORRESPONDANT AUX 4 OBJECTIFS :
- ACTIVITES EN LIEN AVEC L’OP 1 : Réduire les risques de la « fracture numérique » entre femmes et hommes, filles et garçons
L’ Esp@ce de coworking « Laforce des femmes » est un outil de lutte contre la fracture numérique, n espace polyvalent, conçu pour s’adapter à la demande de chacun.e : séances d’étude, de travail individuel ou collectif, de workshop, réunions, vidéo-conférences, etc. C’est un lieu où l’on peut accéder à :
- une place disponible au sein de l’espace commun de co-working. (chacun.e apporte son smartphone, ordinateur portable ou utilise les appareils disponibles sur place, choisit sa place et commence à travailler).
- un espace/poste de travail avec Wifi gratuit, pour y connecter sa tablette, son ordinateur portable ou recharger son smartphone…et accéder à Internet, à une imprimante/ scanner, une photocopieuse,
- une salle de réunion/séminaire (avec panneau de brainstorming, projecteur, etc.),
- une E-Bibliothèque ou E-library (Salon de lecture numérique) mettant à la disposition des lectrices des laptops, tablettes et liseuses (e-readers) donnant accès à des livres, à des modules de formation, à des cours en ligne et à de la documentation en version numérique sur les questions de genre, l’entreprenariat féminin, etc.
- Un espace cosy pour lire et un « jardin détente » pour un moment relax ou discuter sans gêner, un frigo (avec des boissons non alcoolisées )
- un E-Learning center ou Centre d’éducation numérique où femmes et jeunes filles sont initiées aux technologies numériques et ont accès aux MOOC (Massive Online Open Course / Cours en ligne gratuits ouverts à tous)
- un Incubateur d’entreprises et de start-up avec coaching et formation (y compris via les MOOC ou cours en ligne) entre autres sur la méthodologie GERME « Créez votre entreprise » (étude de faisabilité, élaboration de business plan, etc.) à l’intention des femmes et des jeunes.
- Etc.
- ACTIVITES EN LIEN AVEC L’OP 2 : Renforcer les organisations de la société civile (OSC), plus particulièrement celles de défense des droits des femmes, à l’heure de la « transition/révolution numérique »
L’Esp@ce de coworking « La force des femmes » pourrait abriter diverses activités et services (liste non exhaustive et à adapter au contexte urbain, rural, etc.) tels que:
- Mise à la disposition gratuite des membres, clientes ou bénéficiaires, des OSC de l’ensemble des moyens et services offerts par l’Espace de coworking des femmes.
- Initiation, formation et coaching de groupes de femmes, de dirigeantes d’OSC, etc. en utilisation des diverses technologies numériques.
- Formation à la « transition numérique » et aux « technologies citoyennes » ou« civic tech » des responsables d’OSC de femmes, centrée sur l’utilisation plus intensive des outils numériques dans leurs champs d’activité : formation, renforcement des capacités, réseautage, plaidoyer, sensibilisation, analyses/études, etc.
- Dans le contexte d’organisation d’élections, local de permanence et de coworking d’une « Clinique électorale en ligne » encourageant les femmes à se porter candidates, les aidant à se former et les accompagnant sur le chemin de la victoire.
- Dans le même contexte électoral, local de permanence et de coworking d’un Réseau d’observation citoyenne des élections pour un processus électoral démocratique, transparent et apaisé. La mise en œuvre des activités et mécanismes de prévention par un tel réseau [12]
- Espace de coworking pour les rédactrices et correspondantes locales et provinciales d’un magazine féministe en ligne[13].
- Studio de production digitale: équipé pour la production de podcasts et vidéos réalisés sur smartphone (mobile journalism) à l’aide des logiciels de production audio-visuelle multimédia.
- Etc.
- ACTIVITES EN LIEN AVEC L’OP 3 : Promouvoir les « technologies citoyennes » (civic tech) et les plateformes numériques pour une gouvernance plus inclusive et une démocratie plus participative
L’Esp@ce de coworking « La force des femmes » est un outil de promotion des « technologies citoyennes » et plus particulièrement des plateformes numériques de participation.
A l’initiative des gouvernements, des institutions ou encore des organisations de la société civile se mettent de plus en plus en place des mécanismes de participation citoyenne ou de démocratie participative, notamment par le biais des « plateformes numériques de participation » qui sont apparues au milieu des années 2000. Les praticiens de la « démocratie électronique » et des technologies citoyennes ont lancé des sites web et des applications pour contribuer à faire participer les acteurs au-delà de la simple diffusion d’informations à sens unique. Le but était d’aller au-delà des réunions traditionnelles, des enquêtes et autres méthodes de collecte des opinions auprès des citoyen.ne.s qui nécessitaient la présence physique. L’utilisation de ces plateformes numériques offrent beaucoup d’avantages tant pour les citoyens, les habitants, les participants que pour les gouvernements et les institutions, particulièrement dans un pays de la taille immense de la RDC[14] (Voir Annexe B).
Les plateformes numériques permettent aux habitants de participer à des activités collectives comme :
- Proposer de nouveaux projets.
- Délibérer pour se mettre d’accord sur des décisions concertées.
- Planifier l’utilisation des espaces publics.
- Voter sur la façon de dépenser les budgets publics.
- Hiérarchiser les options potentielles.
- Rédiger des politiques et projets de lois
.
Bien que les plateformes numériques aient été conçues à l’origine comme des moyens pour supplanter les processus participatifs traditionnels, il est apparu clairement ces dernières années que la meilleure approche est souvent une approche hybride qui regroupe les forces des expériences en ligne et hors ligne pour mieux servir les communautés.
Les plateformes numériques de participation, véritables outils d’engagement citoyen, peuvent aussi jouer un rôle déterminant lors des processus électoraux :
- La plateforme numérique d’encouragement et de « soutien aux candidatures féminines aux élections » à travers une Clinique électorale en ligne[15]
- Une plateforme numérique d’un « réseau citoyen d’observation du processus électoral » pourrait mobiliser les femmes (sans oublier les hommes) pour exercer une surveillance citoyenne de la régularité du processus électoral afin que les élections soient libres, transparentes, apaisées et renforcent la parité et l’égalité entre femmes et hommes. Ce monitoring citoyen est exercé par des observatrices (et des observateurs) accrédité.e.s par l’organe de régulation des élections ou commission électorale ainsi que par toutes citoyennes (et citoyens). Un tel réseau citoyen s’appuie sur une méthodologie de recherche rigoureuse de l’information recueillie auprès des observateurs-trices, véritables sentinELLES des élections, engagé.e.s bénévolement dans l’observation citoyenne du processus électoral, qui doivent exercer une observation (monitoring ou surveillance) sur les « maladies des élections », c’est-à-dire, sur des faits, des incidents, des pratiques nuisibles à l’intégrité du processus électoral[16].
- Une autre plateforme numérique de « comptage parallèle des résultats » peut permettre de contrecarrer la fraude sur les résultats le jour du scrutin et durant le processus de compilation. Par exemple, les observateurs-trices peuvent le jour du scrutin, photographier avec leur smartphone les résultats affichés devant le bureau de dépouillement. La photo est envoyée à la plateforme de comptage et de compilation parallèle des résultats, permettant ainsi de déjouer les tentatives de fraude électorale[17]. Ces systèmes de surveillance citoyenne des élections peuvent être techniquement mis en œuvre en reposant sur une plateforme web inspirée du logiciel ushahidi.com[18]
Un dernier exemple de plateforme numérique à mettre en place durant un processus électoral est une « Plateforme de veille (monitoring) de la violence à l’égard des femmes pendant les élections (VEFE)[19] » comme mécanisme d’alerte et d’intervention rapide. Ce type de plateforme de veille permet aux victimes de VEFE, aux témoins de VEFE, aux observateurs, aux simples citoyen.ne.s, etc. de communiquer les incidents de VEFE à une « Salle de veille des femmes » qui après une première vérification, transfère ces incidents aux organisations, institutions et acteurs appropriés, qui peuvent à leur tour tenter de résoudre les incidents ou de limiter les risques et orienter les victimes vers les services dont elles ont besoin. Aux fins de collecter les incidents et de mesurer la VEFE, le projet utilise les outils de collecte et de visualisation traitant des données provenant de sources participatives et ouvertes (crowdsourcing) grâce à une plateforme internet permettant de collecter et de visualiser les incidents de VEFE – une première étape dans la collecte de données afin de comprendre l’ampleur du problème et d’y remédier[20].
4. ACTIVITES EN LIEN AVEC L’OP 4 : Contribuer à la régulation des réseaux sociaux et des plateformes numériques en luttant contre les contenus illégaux et les opérations de manipulation de l’information
L’Esp@ce de coworking « La force des femmes est un outil à même de sensibiliser et d’organiser des formations (en ligne ou en présentiel), de lancer des projets et de soutenir des initiatives de la société civile et d’autres acteurs concernés afin d’encourager une utilisation responsable d’internet :
Dans le domaine de la lutte contre la cyber-violence à l’égard des femmes et des filles, c’est-à-dire les VBG par les technologies et canaux numériques afin
- de lutter contre le cyberharcèlement, mais aussi d’aider les victimes à y faire face,
- de mener des actions d’éducation et de sensibilisation auprès de la jeune génération pour éviter la prolifération de violences à l’égard des femmes et des filles, y compris de violences commises en ligne ou facilitées par la technologie
- de soutenir des projets destinés à sensibiliser les jeunes à la violence dans les fréquentations amoureuses, notamment lorsqu’elle s’exerce en ligne,
- d’aider les professionnels concernés, dont les enseignants, à mieux connaître et reconnaître la violence et le harcèlement en ligne pour améliorer la prévention et la protection des filles et des femmes
- de publier une bande dessinéepour faire prendre conscience de la violence qui s’exerce en ligne contre les femmes et les filles.
- etc.
Dans le domaine de la lutte contre les discours de haine et les appels à la violence afin :
- de mobiliser les réseaux et de former des alliances entre les acteurs de la lutte contre les propos haineux en ligne;
- de donner aux individus les moyens d’élaborer un contre-discours et des messages alternatifs au discours de haine,
- de plaider pour l’instauration de nouvelles infractions pénales, ou à étendre la définition d’infractions existantes, de manière à viser des comportements préjudiciables ou des actes de violence spécifiques commis en ligne ou au moyen de la technologie
- de produire des guides sur le genre et la citoyenneté, qui contiennent aussi des lignes directrices concernant la sécurité sur internet,
- etc.
Dans le domaine de la lutte contre la désinformation et les fake news afin :
- d’éviter la circulation de rumeurs et de fausses nouvelles, à toutes les étapes du processus.
- de renforcer les capacités de la communauté des médias (dont les médias en ligne et autres faiseurs d’opinion sur les réseaux sociaux) afin de promouvoir un environnement libre, pluraliste, indépendant et apaisé, y compris pendant les périodes électorales les plus actives.
- de renforcement les capacités de la communauté média afin qu’elle s’organise de manière professionnelle, indépendante et crédible lors de la couverture des élections, y compris avec la mise en place d’un système de lutte contre les « fake news » et le discours haineux.
- de créer des contenus de formation et de sensibilisation aux enjeux de la lutte contre la désinformation
- de former des acteurs-trices directs des médias (journalistes, blogueurs, web activistes) aux techniques de vérification des faits, à la production et la diffusion de contenus à fort potentiel d’impact pour lutter contre la désinformation.
- de sensibiliser des acteurs indirects issus du secteur de l’éducation (universités, écoles secondaires, etc.) de la société civile (organisations de femmes et de jeunes)
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NOTES :
[1] rapport de l’UNESCO et du partenariat Equals, « Je rougirais si je pouvais », https://www.equals.org/ ; https://bit.ly/332wCkc
[2] Fracture numérique Burundi EDSIII POSSESSION ET UTILISATION DE COMPTES BANCAIRES ET DE TÉLÉPHONES PORTABLES :
« La possession d’un compte bancaire et d’un téléphone portable peuvent contribuer à renforcer l’autonomie et l’indépendance financière. Au cours de l’EDSB-III, 2016-2017, il a été demandé aux enquêtés s’ils utilisaient un compte dans une banque ou dans une institution financière et s’ils possédaient un téléphone portable. À ceux qui possédaient un téléphone portable, on a demandé s’ils l’utilisaient pour effectuer des transactions financières. Les résultats mettent en évidence des disparités importantes entre les femmes et les hommes (Tableaux 15.7.1 et 15.7.2). Le pourcentage d’hommes qui utilisent un compte dans une banque ou dans une institution financière est plus de deux fois plus élevé que chez les femmes (11 % contre 5 %) (Graphique 15.2). De même, 48 % des hommes contre 24 % des femmes possèdent un téléphone portable.
Variations selon certaines caractéristiques
- L’utilisation d’un compte bancaire et la possession d’un téléphone portable sont beaucoup plus répandues en milieu urbain qu’en milieu rural. Par exemple, en milieu urbain 20 % des femmes utilisent un compte bancaire et 62 % possèdent un téléphone portable contre, respectivement, 3 % et 18 % en milieu rural. Les mêmes variations s’observent chez les hommes.
- Que ce soit chez les femmes ou chez les hommes, les pourcentages qui utilisent un compte en banque et qui possèdent un téléphone portable augmentent avec le niveau d’instruction : 47 % des femmes ayant le niveau secondaire ou supérieur possèdent un téléphone portable et 15 % utilisent un compte en banque contre respectivement 10 % et 2 % parmi celles sans niveau d’instruction.
- L’utilisation d’un compte bancaire et la possession d’un téléphone portable varient de manière importante en fonction du niveau de bien-être du ménage, cela pour les femmes comme pour les hommes : dans le quintile le plus bas, 0,3 % des hommes et 1 % des femmes utilisent un compte en banque contre respectivement 31 % et 20 % dans le quintile le plus élevé. »
[3] Selon le rapport Gros plan sur l’égalité des sexes 2022 d’ONU Femmes, l’exclusion des femmes du monde numérique a réduit de 1 000 milliards de dollars le produit intérieur brut des pays à revenu faible et intermédiaire au cours de la dernière décennie, une perte qui atteindra 1 500 milliards de dollars d’ici 2025 si rien n’est fait
[4] Il faut noter que le thème de la Journée internationale des femmes, le 8 mars 2023 (JIF 2023) est : « Pour un monde digital inclusif : innovation et technologies pour l’égalité des sexes ». Ce thème est associé au thème prioritaire de la 67e session de la Commission de la condition de la femme (CSW-67), à savoir « L’innovation, le changement technologique et l’éducation à l’ère du numérique pour réaliser l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles ». Voir https://www.unwomen.org/fr/nouvelles/annonce/2022/12/journee-internationale-des-femmes-2023-pour-un-monde-digital-inclusif-innovation-et-technologies-pour-legalite-des-sexes
[5] Dalia Research, Alliance of Democracies, and Rasmussen Global, “Global Perceptions of Democracy.”
[6] Cette étude cible quatre pays africains (Bénin, Kenya, Sénégal, Tunisie), dont aucun d’Afrique Centrale, et met en évidence une évolution à plusieurs vitesses : « En Afrique, le secteur des civic tech connaît une croissance à plusieurs vitesses. Les initiateurs de projets évoluent dans des contextes législatifs et réglementaires très contrastés. Il y a, d’une part, les pays qui disposent d’un cadre favorable au développement des projets numériques en général, et civic tech en particulier et, d’autre part, ceux qui ne se sont pas dotés d’un arsenal particulier dans ce domaine.
La méfiance des pouvoirs publics, les difficultés à mobiliser de larges communautés de citoyens et les difficultés d’accès aux financements entravent significativement le changement d’échelle des projets civic tech qui naissent le plus souvent d’initiatives spontanées.
La formalisation des actions de formation, de partage d’expériences et de compétences, déjà en place dans un cadre informel, devrait permettre de faire émerger des communautés d’experts et de citoyens outillés pour contribuer efficacement à la conception, à la mise en œuvre et au suivi des politiques publiques ».
[7] PNUD, Cartographie des risques de conflits en république démocratique du Congo, avant, pendant et après les élections de 2023, Rapport final, juin 2022.
[8] « Pas de place pour la violence à l’égard des femmes et des filles dans le monde numérique »
[9] https://deboutcongolaises.org/comment-contrer-les-discours-de-haine-et-la-desinformation-genree-en-ligne/
[10] Sur la problématique plus large de la violence à l’égard des femmes dans les élections voir Les « SentinELLES » contre les violences envers les femmes pendant les élections : un projet de l’Observatoire de la parité
[11] L’UNESCO a accueilli à Paris du 21-23 février 2023 la conférence « Pour un Internet de confiance » pour discuter d’un ensemble de projets des principes mondiaux pour la régulation des plateformes numériques, afin d’améliorer la fiabilité des informations et de protéger la liberté d’expression et les droits de l’homme. https://www.unesco.org/fr/internet-conference
[12] Voir l’expérience du Réseau d’observation citoyenne du processus électoral (en RDC) qui pourrait être facilitée, sur un plan technique, logistique et financier, par la mise à disposition de ce réseau de l’Espace de coworking)
[13] Voir l’expérience du du magazine féministe en ligne « Debout congolaisEs ! » , édité par l’Observatoire de la parité et de l’égalité H/F
[14] L’on a pu observer les avantages des « civic tech » et de la démocratie participative dans le monde entier, des zones rurales de la Russie aux grandes villes américaines, en passant par des pays entiers comme le Brésil. La participation citoyenne prend différentes formes selon les contextes. Au Brésil, par exemple, la budgétisation participative a fonctionné dans des endroits aussi variés que le Sud riche et le Nord-Est pauvre du pays. Cette grande variété de contextes suggère que la participation ouverte est suffisamment flexible pour répondre aux besoins locaux dans divers endroits.
[15] Pour découvrir les modules opérationnels voir la Clinique électorale en ligne,
[16] – les incitations à la haine et à la violence, les discours divisionnistes et manipulatoires de partis politiques et des candidats y compris à travers les médias
– le non-respect de la loi électorale et des obligations figurant dans un Code de bonne conduite des partis politiques
– les violations des droits de l’homme liées à la période pré-électorale, particulièrement la violation des libertés fondamentales, comme la liberté de réunion, d’expression, de manifestation, etc. dont les autorités politico-administratives, le secteur de sécurité peuvent être rendus responsables.
– les incidents de discrimination et de violence verbale, psychologique, physique, particulièrement ceux contre les femmes candidates engagées dans le processus électoral,
[17] Pour en savoir plus sur ce qu’est le « comptage parallèle (et rapide) des résultats » :
https://www.youtube.com/watch?v=-96lo9wtRt0&t=158s
[18] Ushahidi est un logiciel gratuit et open source permettant aux citoyens de décrire et de géo-localiser sur une carte interactive les situations dont ils sont témoins via SMS, photos, vidéos, email et les réseaux sociaux. En langage technique, on appelle cela du «crowdsourcing» ou comment compiler, visualiser et donner du sens à des milliers de données et de témoignages qui émanent de la «foule» (crowd ). Ushahidi peut facilement être utilisé pour faire le monitoring des violences pré-électorales, l’observation du scrutin et aussi du processus de compilation. Ce type de plateforme, reposant sur l’exercice actif de la « citoyenneté numérique » mise en action par des E-citoyen.ne.s a été développée en Afrique ces dernières années , par exemple au Libéria (2011), Senegal (2012), Kenya (2013),Mali (2013), Ouganda (2016), Ghana (2016) etc.
Pour plus de détails sur les diverses expériences de monitoring citoyen du processus électoral impliquant fortement les femmes, CLIQUEZ ICI ; sur les « Salles de veille pour les femmes, lisez l’article « The Women’s Situation Room in Africa, An Initiative for Peaceful and Inclusive Elections« , en CLIQUANT ICI ou encore ICI pour une (mauvaise) traduction en français ; sur la Salle de veille pour les femmes au Sénégal, avec le soutien de ONU-Femmes, du PNUD, du HCDH, CLIQUEZ ICI.
[19] Pour une présentation détaillée voir Les « SentinELLES » contre les violences envers les femmes pendant les élections : un projet de l’Observatoire de la parité
[20] Ce projet utilisera également l’outil de collecte de données et de visualisation de la violence électorale le plus largement reconnu : la plateforme de cartographie à source ouverte (open source) Ushahidi, qui signifie « témoin » ou « témoignage » en swahili. Elle repose sur des données de source participative recueillies auprès du grand public, envoyées par SMS, WhatsApp, Facebook, YouTube, appels téléphoniques, e-mail, etc. Les données sont transmises à une plateforme internet et reportées sur des cartes géographiques en accès libre, telles que Google Maps.[2] Ce mécanisme implique la mise à disposition d’outils sur la façon d’intégrer les systèmes d’alerte précoce et la VEFE dans les formulaires de rapport, les formulaires de signalement des incidents et les listes récapitulatives (checklists) utilisés par les observateurs.
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